Bloombox n°2 : La course contre la montre, perdre du temps pour enfin en gagner ?
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Je suis Jessica Djeziri, DRH et associée chez Bloomays. Je vous donne rendez-vous tous les mois pour un nouveau numéro de ma ma newsletter, la BloomBox, pensée comme une boîte à outils utile, simple, et directe.
J’y partage mon expérience et ce que j’ai appris avant ou après Bloomays. Vous y trouverez :
✔️ Un regard franc sur les actualités RH
🧰 Des outils concrets qu’on utilise chez nous
💡 Et des idées pour mieux valoriser le rôle des RH dans nos entreprises
Comme la plupart des RH que je connais, il m’arrive souvent d’être surchargée. Les chiffres alarmants, vous les avez sans doute vu passer (82% des RH au bord de l’épuisement…). Que ces chiffres vous aient inquiété ou, au contraire, permis de vous sentir moins seul·e, le constat est le même : le temps semble toujours être l’ennemi numéro 1 des équipes RH. Plus récemment, un excellent article de Yannick Merciris sur The Daily Swile partait de ce constat et interrogeait les premier·e·s concerné·e·s : quelle solution imaginer à cette grande pénurie de temps ?
Le temps : c’est l’argument qui revient inévitablement, à chaque fois que je discute avec mes clients de leurs problématiques RH. Bien sûr, tout le monde comprend l’intérêt d’avoir des équipes mieux organisées, de mieux structurer ses méthodes… Mais une fois qu’on s’est alignés sur le principe, on n’a pas le temps de mettre tout ça en place. Alors, on préfère tirer à vue, résoudre les problèmes à mesure qu’ils apparaissent. Et on perd du temps en voulant en gagner.
Moi, je ne prétends pas être une experte en gestion du temps. Mais s’il y a une leçon que j’ai apprise et qui ne se dément jamais, c’est que pour gagner du temps, il faut savoir l’investir intelligemment.
La malédiction des équipes RH
Quand un problème touche la plupart des membres d’une profession, c’est qu’il n’est pas individuel. Il faut s’en rappeler pour déculpabiliser. Mais ça ne veut pas dire qu’on n’y peut rien. Ceux qui me connaissent savent que je n’aime pas me plaindre en restant les bras croisés. Alors, la première étape, c’est de bien comprendre les éléments qui rendent le temps si difficile à apprivoiser.
Les problèmes commencent souvent dès le moment où nous prenons nos postes. C’est-à-dire, bien souvent, trop tard par rapport au développement de l’entreprise. Comme l’explique brillamment Albane Bressolle Chataigner dans cet article, les dirigeants ont tendance à sous-estimer leurs besoins RH. Ils ne prennent pas forcément le temps de se demander quelles seront leurs missions prioritaires et d’en déduire les bons profils RH à recruter.
Résultat : non seulement on embauche les RH trop tard, mais on s’attend toujours à ce que leur périmètre soit bien plus large que ce qui est humainement à faisable. Le fameux mythe du « couteau suisse » ou du « mouton à cinq pattes » continue de faire des ravages : on cherche quelqu’un qui puisse tout faire. C’est d’ailleurs un argument qui revient dans l’article du Daily Swile.
J’en ai personnellement fait les frais : lorsque j’étais HR manager (le fameux poste “généraliste” qu’on veut tous!) il y a une dizaine d’années, j’étais seule sur mon périmètre, qui englobait le recrutement, la formation, le développement des collaborateurs…
Or, seulement 25% de mes objectifs annuels concernaient le plan de recrutement pour ma structure, alors même que j’avais 70 recrutements par an à effectuer sur une population de 150 salarié·e·s, ce qui correspondait déjà à un poste de chargé de recrutement à temps plein. À la fin de la première année, ma responsable m’avait fait le reproche: je m’étais trop concentrée sur le recrutement, mon objectif était atteint sur ce point mais les autres projets en avaient souffert.… Heureusement, on a par la suite pris la décision de recruter plusieurs personnes pour m’aider à délivrer sur la totalité de mes objectifs.
Si on veut avoir une chance de gérer notre temps, il faut d’abord que nos équipes soient bien organisées. Ça ne veut pas dire qu’il faudrait qu’on travaille en silos, mais que les missions soient bien réparties entre nous. Et ça… ça demande du temps.
Décider de ce qu’on ne fera pas
C’est une étape indispensable, qu’on ne fait pas assez. J’ai remarqué cette tendance chez la plupart des RH que je connais : faire passer les besoins des autres avant les siens. C’est normal, c’est dans l’ADN du métier : on ne devient pas RH sans un profond sens du service, et pour bien réussir, il faut qu’on soit dévoué aux autres. Surtout quand les autres expriment clairement leurs frustrations…
Résultat : on continue d’avancer avec des cailloux dans nos chaussures — chaque pas est douloureux, mais on n’a pas le temps de les retirer. C’est-à-dire qu’on oublie de régler les problèmes qui ne sont visibles que de nous. Plutôt que de prendre le temps de réfléchir aux automatisations qu’on pourrait mettre en place pour se simplifier la vie, on tente de résoudre les problèmes à mesure qu’ils émergent.
Ça me fait penser au meilleur conseil professionnel qu’on m’a jamais donné : « La stratégie, c’est décider de ce qu’on ne fera pas. » C’est en acceptant de faire moins qu’on peut faire mieux, prendre le temps de se poser pour aller au bout d’un sujet plutôt que de le survoler.
Par exemple, quand on n’a pas de système d’information RH performant, on perd un temps fou. Sur la gestion de la paie, surtout : il n’y a pas encore si longtemps, j’étais encore amenée à devoir imprimer les bulletins de paie, les mettre sous pli, les distribuer… Alors qu’on pourrait faire ça en un seul clic si on avait les bons outils. C’est difficile, mais il faut accepter de prendre un peu de retard sur ses opérations quotidiennes pour mettre en place un SIRH, et on gagne un temps fou sur les mois et les années à venir. Il faut aussi sacrifier certains projets pour la bonne cause.
Prendre le temps pour poser les bonnes bases
Investir des heures pour mettre en place un nouveau système ou apprendre une méthode paye toujours. Même si ça nous met en retard sur notre liste de tâches du jour. Bonus si on y consacre du temps sans s’éparpiller entre calls, meetings et emails urgents…Les RH sont un métier bien plus créatif qu’il n’y paraît et nous avons besoin de plages de travail ininterrompues pour préserver notre concentration et être capable de réfléchir posément, voire même innover.
Plus les outils sont innovants, plus il faut du temps et des efforts pour les implémenter. En ce moment, on m'interroge souvent sur l’utilisation de l’IA en RH : est-il vraiment possible de déléguer aux algorithmes les tâches administratives et les missions très répétitives sans forte valeur ajoutée ? Peut-on créer un chatbot de l’onboarding de nouveaux collaborateurs tout en restant disponible en soutien ?
On en parlait dans ce webinar il y a un an : la réponse est oui. L’IA peut permettre de réduire la charge mentale des RH. Mais à une condition : avoir construit une base documentaire RH sur laquelle le modèle peut être entraîné. Pour moi, le handbook RH de Gitlab est un exemple parfait qui n’a pas été égalé depuis toutes ces années : exhaustif, clair, structuré, il est la base idéale où les humains (et l’IA) peuvent aller chercher l’info. Bien sûr, il a fallu fournir du travail pour en arriver là. Ce chantier peut paraître insurmontable surtout quand on est plongé dans les exigences du quotidien. Mais il en vaut largement la peine. Pour ma part, j’y suis arrivée pas à pas, sans chercher à faire quelque chose de parfait - commencer par une FAQ par exemple. Et surtout : on peut se faire accompagner pour le mener à bien. S’appuyer sur des prestataires externes pour organiser structurer ses people operations (opérations RH) et repartir sur de bonnes bases.
Les vrais progrès sont d’abord chronophages… et vous rendent plus efficaces ensuite. Surtout que nous les RH savons le faire quand c’est nécessaire. Par exemple, dans le cas des relations sociales avec les syndicats ou la CSE, par exemple, on se montre très structuré car tout le cadre est imposé par la loi. J’aimerais beaucoup que notre métier puisse faire la même chose quand ce n’est pas “juste” dicté par le code du travail, mais bien parce que ça nous simplifie la vie.
C’est d’autant plus le cas quand on parle de recrutement (ou alors, j’y suis plus sensible, car c’est notre spécialité chez Bloomays): je conseille systématiquement de procéder avec méthode. De prendre le temps de réfléchir à ses besoins et à ses objectifs en amont, de s’aligner avec toutes les parties prenantes, de centraliser les informations (en bref, d’utiliser une scorecard). Bien sûr, le recrutement est souvent vu comme une discipline “réactive”, où il est nécessaire d’aller vite pour répondre à un besoin : lorsque nos clients viennent vers nous, ils cherchent souvent quelqu’un qui doit prendre ses missions… hier. Malgré le workforce planning, les projets de recrutement sont souvent imprévisibles; mais cela ne doit pas nous empêcher de les approcher avec rigueur et structure pour recruter efficacement.
Pourtant, il est nécessaire de prendre son temps parce que les erreurs peuvent être coûteuses. C’est pour cette raison qu’on a mis au point une méthode pour recruter sans se tromper, et qu’on l’applique systématiquement à toutes nos missions.
Évidemment, tout ça, je le sais aussi parce que d’autres RH me font des retours d’expérience réguliers, et que je prends le temps de discuter de mon quotidien avec la communauté RH que j’ai construite au fil des années. Ces échanges sont un aspect crucial de nos métiers qui passe parfois à la trappe parce qu’on s’imagine ne pas avoir le temps. À tort ! C’est c’est en partageant avec ses pairs qu’on apprend le mieux.
C’est pour cette raison que Bloomays a décidé de sponsoriser le Festival RH qui aura lieu les 2 et 3 octobre 2025 (j’aurais le plaisir d’y prendre la parole !). Le projet du Festival RH, c’est donner un coup de boost positif à la fonction RH et inspirer ses pair/es à se dépasser.
D’ailleurs, j’ai un code promo pour les inscriptions : n’hésitez pas à m’écrire si ça vous intéresse !